Eh oui, ce soir, c'est pizza à la maison !!
D'abord, parce que la choupette a réclamé. La choupette est dingue de pizzas. Comme ses soeurs.
Ensuite, parce que du coup personne ne râle, les mouflettes mangent de bon coeur, c'est la fête, je deviens leur idole, bref, un dîner sympathique.
Et aussi parce que ce n'est pas moi qui cuisine la pizza. Et que donc c'est rudement reposant.
Oui parce qu'il faut dire que ce soir, j'ai bien besoin de repos.
La fameuse opération a eu lieu il y a 10 jours. Ca y est, j'ai un organe en moins.
Alors il faut être honnête, hein, ça s'est bien terminé mais je n'irais pas clamer que tout s'est bien passé.
Enfin ce qui est fait n'est plus à faire et une vésicule retirée ne fera plus de calculs biliaires.
Et puis finalement c'est aussi bien que je n'aie pas anticipé la douleur et l'abrutissement les jours qui ont suivi, ça m'a évité de m'angoisser aussi sur ça
.
J'avais bien assez à faire avec ma terreur de l'anesthésie.
Ce qui est drôle c'est que je n'aurais jamais eu peur avant d'avoir des enfants.
Mais là, je regardais mes filles et je me demandais, est-ce qu'elles auront encore une mère dans 10 jours ? dans 3 jours ? demain ?
Les 3 soirs qui ont précédé l'opération je n'ai pas dormi.
J'avais envisagé de me filmer avec un message pour les mouflettes okazou je serais du mauvais côté des statistiques. Sauf que je me suis imaginé mes 3 mouflettes
... en train de regarder à la télé leur maman qu'on venait d'enterrer ... et je me suis dit, c'est cruel : elles ne vont rien capter. J'ai voulu leur écrire une lettre, mais d'ici à ce
qu'elles la lisent ça n'aurait plus de sens.
Alors je leur ai fait un dessin, la veille, j'avais le temps en attendant l'aube de toute façon. J'ai dessiné 3 jolies sirènes, et
puis j'ai juste écrit à chacune de mes mouflettes que je l'aimais, avec quelques éléments que j'aimais particulièrement chez elles.
J'ai envoyé un message à l'ours en récapitulant tous les rendez-vous importants pour les filles et en lui indiquant où trouver mes mots de passe, si besoin.
Après avoir tout bouclé, la veille, je me suis couchée sans réussir à dormir.
Et puis tôt le matin j'ai pris mon sac avec des livres et des magazines, mon dossier médical, et je suis descendue rejoindre la voiture d'une collègue qui m'a
très gentiment déposée à la clinique.
L'anesthésiste n'avait pas prescrit dans mon dossier la prémédication qu'il m'avait promis de me donner pour m'aider à me détendre.
J'ai dû taper des sommets d'angoisses, d'autant que le chirurgien était introuvable et que je suis restée les bras en croix, attachés avec une perfusion, sous
les lampes éteintes, à attendre qu'on m'injecte le produit. L'anesthésiste, las d'attendre, a fini par partir en demandant qu'on le bippe, heureusement l'infirmière était adorable.
Maintenant, je n'arrive plus à m'endormir le soir tellement j'ai eu peur, pendant tellement longtemps.
Et finalement, j'ai tellement flippé sur l'anesthésie que la première chose que j'ai pensé en me réveillant c'est "je suis vivante".
La deuxième chose c'est "j'ai mal au ventre".
Et la troisième chose quand j'ai coassé que j'avais mal et que j'ai senti que le larynx grattait, c'est "ah oui, on m'a intubée".
J'ai passé 4h à supplier qu'on soulage la douleur (qui était liée au gaz injecté dans l'abdomen pour pouvoir manier les instruments pendant la coelioscopie : à
mon avis après les 3 grossesses mon abdomen a dû se déployer comme un chapiteau ... il restait beaucoup de gaz à évacuer).
On ne voulait pas me donner de morphine : je ne sais pas pourquoi les soignants étaient persuadés que j'y étais intolérante et que ça me ferait vomir.
Franchement, à choisir, j'aimais autant avoir des nausées.
Pour finir j'ai supplié qu'on me refasse une anesthésie, qu'on me rendorme, et qu'on ne me réveille que quand j'aurais moins mal ...
L'infirmière m'a regardée en penchant la tête, m'a dit gentiment qu'on ne faisait pas ça ... (bah je n'y croyais pas vraiment mais
j'étais prête à me refaire injecter n'importe quoi tellement c'était douloureux).
Elle est partie en me disant - comme toutes les demi-heures - qu'elle allait demander (à qui ?). Et pour la première fois en 4h elle est revenue !! Et m'a mis une
perfusion de morphine ... et injecté du tranxène (là je me suis dit que j'avais vraiment cassé les pieds des soignants).
C'est magique la morphine. Ca, le tranxène et 3 nuits quasi blanches, pfiout, je me suis bien assoupie;
Je me suis réveillée en découvrant qu'effectivement, j'étais intolérante à la morphine (bah, fallait tester), et du coup j'ai passé une nuit sur place (je sens bien
que le chirurgien était déçu que je ne récupère pas plus vite) .
J'ai retrouvé les mouflettes le lendemain, et après quelques jours abrutie de vertiges et de nausées j'ai eu le plaisir de babysitter ma choupette écrasée de
fièvre.
Je me suis levée le lendemain. J'ai coupé les fils avec un vrai soulagement (c'est ce qui faisait encore mal).
Et le surlendemain je me suis recouchée, écrasée de fièvre.
Le gag.
(Si vous croyez qu'on n'a le droit à aucun traitement pour soigner une crève quand on est enceinte ou qu'on allaite, je vous recommande de tester la grippe en
post-opératoire, un must dans le genre ...)
L'autre gag c'est que je n'ai pas le droit de porter les filles pendant 3 mois, et bien sûr ma choupette malade exige d'être portée en continu.
Le dernier gag c'est que l'ours est absent.
Bé oui, je suis seule avec les filles depuis vendredi midi.
L'ours est en week-end : sa première sortie depuis la naissance des filles, un bon plan pour aller voir le rallye de Montecarlo avec un de ses meilleurs
potes.
Le programme faisait rêver, alors même si c'était près de l'opération on s'est dit, banco. Faut dire qu'on a cru le chirurgien qui m'avait dit "vite remise, vite
sur pied". Et puis les microbes, on n'avait pas prévu.
Alors on est restées, toutes les 5. Les mouflettes, moi, et la grippe. De quoi s'occuper.
Et samedi matin, miracle : il a neigé !
Depuis le temps qu'on attendait ça ... vite, j'ai habillé les mouflettes, fiévreuses dopées au paracétamol, luge sous le bras on est sorties profiter de l'occasion,
les yeux brûlants mais le coeur en fête.
Elles sont tellement contentes les mouflettes ...
Et dimanche matin, youpi, encore de la neige, encore de la luge. Avec heureusement mes copines qui m'ont aidée à gérer.
Pauvre ours. Les boules. Dire qu'il a raté ça. Occupé à nager sous la pluie dans la piscine de son 4 étoiles, en présence de russes buvant du champagne.
J'ai soigné (et porté) la choupette, j'ai gardé les mouflettes ... on s'est bien débrouillées ensemble.
Même si je n'ai pas eu une seconde à moi (mais comment font mes copines dont le mari est souvent en déplacement ?)
Hier soir, j'ai appris que le vol de retour de l'ours était annulé à cause de la neige.
Le gag.
Finalement, on a réussi à trouver un billet de TGV, l'ours arrivera dans la nuit. Et nous, on est claquées.
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Voilà pourquoi, ce soir, pour les filles, c'est pizza.
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J'ai mérité.
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